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dimanche 14 février 2016

La lettre de l'évêque

Le 1er Dimanche de Carême, est lue traditionnellement la lettre de l'évêque. Comment obtenir un bon tampon sur son passeport et le garder? Toute la problématique...

Cette lettre es accessible à cette addresse : Hirtenwort 2016 F als PDF (PDF, 181 Ko)
Une vidéo l'est à celle-ci : Video Hirtenwort F 2016 (MP4, 273.9 Mo)

Notre identité chrétienne :
Faire mémoire et confesser sa foi, être reconnaissant et miséricordieux
Lettre pastorale pour le 14 février 2016
+ Félix Gmür
Evêque de Bâle

1er dimanche de carême, année liturgique C 14 février 2016


Le texte est à lire comme homélie lors des célébrations du samedi et du dimanche, 13 et 14 février 2016, ou à diffuser d'une autre manière appropriée.


Chers frères et sœurs,
Chez nous, il est rouge. Ailleurs, il est bleu ou vert. Chaque fois que nous partons pour un long voyage, nous l'avons sur nous. Celui qui s'en va de son plein gré est souvent fier de l'avoir sur lui. Celui qui est contraint de partir le cache peut-être ou s'en débarrasse. Car il révèle l'origine et l'identité. C'est le passeport. Il atteste que nous sommes suisse, allemand, italien, syrienne, australien, congolaise ou bolivien. L'identité nationale se concrétise dans ce document. Avec un nom, une photo, une nationalité.
Ce n'est toutefois pas le passeport qui constitue la véritable identité. L'identité naît de la langue, de l'expérience, d'une histoire commune.
Et nous, qui sommes chrétiens ? Quelle est notre identité ? Si nous avions un passeport chrétien, on y trouverait sûrement le symbole des Apôtres. Celui ou celle qui professe la foi chrétienne déclare publiquement et librement qu'il croit en Dieu, Père, Fils et Saint-Esprit. C'est une partie de notre identité chrétienne, notre identité officielle, pourrait-on dire. Elle est de notoriété publique - exactement comme un passeport. Avec un nom et une profession de foi. C'est toujours pareil.
C'est sur cette base que se développe l'autre partie de l'identité d'un chrétien ou d'une chrétienne. Elle apparaît lorsque nous croyons dans notre cœur ce qu'affirme notre bouche, comme nous l'avons entendu dans la lecture de la lettre aux Romains. La profession de foi a des conséquences, sinon elle finit par arriver à échéance, comme un passeport. C'est l'identité qui n'est pas figée une fois pour toute, mais qui se renouvelle sans cesse. C'est l'identité vécue. C'est nouveau à chaque fois.
La lecture du livre du Deutéronome nous donne un exemple. Au commencement, il y a l'expérience, c'est-à-dire l'histoire commune vécue avec Dieu. La petite profession de foi historique du peuple d'Israël repose sur ces fondations. Elle est encore répétée de nos jours, année après année, lors du rite d'action de grâce pour les récoltes. Elle raconte le départ d'un Araméen sans nationalité qui est arrivé en Egypte comme étranger et qui est devenu un grand peuple. Ce peuple a été maltraité et ses droits n'ont pas été reconnus. Les membres de ce peuple ont alors commencé à crier vers Dieu. Ils l'ont appelé à l'aide. Leur identité devient ainsi plus concrète ; elle devient vivante. Avec un nom, une profession de foi, une prière.
Et Dieu ? Dieu entend leur cri. Il voit quelle injustice ils subissent et comment ils s'effondrent sous la charge de travail. Il compatit et ressent leur détresse. Dieu montre de la compassion. Voilà pourquoi il sauve son peuple de cette misère. Il mène les hommes et les femmes vers une vie sans famine ni soif, sans persécution ni exploitation. Il les mène dans un pays où coulent le lait et le miel. Un petit paradis sur terre !
Le peuple s'en montre reconnaissant. Il sait que cela ne va pas de soi. C'est pourquoi il se remémore sans cesse ces événements et rend grâce à Dieu en lui offrant ses premiers fruits lors de la Fête des récoltes. Et il y a encore autre chose, importante elle aussi : Les membres du peuple de Dieu ne restent pas seulement entre eux. Ils fêtent avec toute la famille et « l'immigré qui réside au milieu de toi », comme nous pouvons le lire au verset 11, qui vient juste après la lecture d'aujourd'hui. Pas tout seuls, mais avec l'étranger qui est parmi nous !
Par le rite de la Fête d'action de grâce pour les récoltes, Israël interprète son histoire. Le peuple d'Israël se remémore sans cesse qu'il a été lui-même étranger, socialement déclassé, indésirable et qu'il a finalement été entendu et sauvé par Dieu. Il fait le lien entre la gratitude et la profession de foi en Dieu. Année après année, Israël fait mémoire, rend grâce et professe ainsi son identité de peuple de Dieu sauvé. Avec un nom, une profession de foi, une action de grâce. C'est toujours pareil. C'est nouveau à chaque fois.
Nous le faisons aussi, nous les chrétiens. A chaque célébration de l'eucharistie, qui est une célébration d'action de grâce, nous interprétons notre histoire avec Dieu. Nous sommes là, avec notre nom, nous professons notre foi et nous rendons grâce. Nous nous assurons de notre identité. Avec un nom, une profession de foi, une action de grâce. C'est toujours pareil. C'est nouveau à chaque fois.
Ce n'est pas sans conséquence. La gratitude envers Dieu se manifeste dans la solidarité envers les autres et les étrangers. Se souvenir avec reconnaissance de sa propre histoire est un acte qui contient déjà en lui-même l'appel à défaire les entraves de l'injustice et à respecter les étrangers. Celui qui a lui-même été étranger ne peut pas exclure les étrangers de la fête. Non parce qu'on ne pourrait pas fêter sans eux. Pas non plus parce que leur présence serait la garantie que la fête soit plus belle. Mais parce que les étrangers ont part, comme tous les autres, à la vie en abondance.
Le Dieu d'Israël est aussi notre Dieu. Il montre de la compassion car il est ému par la détresse des hommes. Il sauve. En un mot : Il est miséricordieux. Miséricorde est son nom, son identité. C'est toujours pareil. C'est nouveau à chaque fois.
Nous, les chrétiens, nous croyons en ce Dieu miséricordieux. La confession de notre foi en lui figure dans notre passeport chrétien. L'identité chrétienne vécue est la réponse que nous donnons à notre Dieu qui, à travers toute l'histoire, se montre solidaire des étrangers, des méprisés, des pécheresses et des pécheurs et qui, finalement, s'est fait homme en Jésus Christ.
En cette Année sainte de la Miséricorde, j'ai la chance de visiter des lieux dans lesquels des hommes et des femmes professent notre identité chrétienne de manière variée. C'est ici que vit la miséricorde de Dieu. C'est là que des personnes sont soutenues, que des défavorisés sont intégrés, que des marginaux sont remis au centre. C'est là que la misère des étrangers touche les cœurs. Et le cœur croit ce que la bouche affirme. Notre identité vécue marque notre passeport chrétien du sceau de la validité.
Pour que le passeport n'arrive pas à échéance et conserve sa validité, nous avons à nous assurer sans cesse de notre identité chrétienne. Elle est notre origine, notre histoire, notre présent, notre avenir. Soyons donc attentifs aux mots avec lesquels nous construisons notre identité, attentifs aux faits et aux noms qu'ils portent. Traitons avec attention les histoires et les souvenirs qui nourrissent notre identité chrétienne. Avec la mémoire et avec miséricorde. C'est toujours pareil. C'est nouveau à chaque fois.
Chacune et chacun vit cela pour soi, avec le passeport chrétien de la couleur qui lui est propre. Nous le vivons collectivement en tant que communautés chrétiennes, avec le passeport chrétien multicolore. C'est ainsi que notre voix se fait plus forte dans le monde. Que nous disait déjà la lecture ? Tous ensemble, ils ont commencé à crier, et c'est alors que Dieu les a entendus. Le monde qui nous entoure ne pourra pas non plus faire autrement.
Je nous souhaite à nous tous et toutes le souffle qui nous permet de vivre et d'affermir notre identité chrétienne, à voix forte ou peut-être à voix basse. Que Dieu pour cela soit notre force !
Bien à vous !
+Félix Gmür Evêque de Bâle



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